Les monnaies alternatives ont tendance à se développer en temps de crise puisqu’elles constituent un bon moyen de compenser les pertes potentielles par un autre type d’échange. Ce fut le cas de la monnaie WIR développée en Suisse dans les années 1930 ou du Sardex développé en Sardaigne suite à la crise des subprimes. Ces périodes sont caractéristiques d’une recherche d’alternatives par les acteurs ainsi que d’une prise de conscience des possibilités locales.

Exemple du WIR

La banque coopérative suisse WIR est sans aucun doute la plus connue des monnaies locales inter-entreprises. Créée en 1934, elle découle d’un projet alternatif de militants pour un système de crédit mutuel ouvert à des acteurs variés. Les objectifs des créateurs du WIR sont de permettre aux acteurs « d’économiser leurs avoirs en franc suisse et de consolider leur activité par un mécanisme de solidarité, en enregistrant leurs transactions mutuelles en une unité de compte interne et spécifique sur des comptes où les dettes et créances mutuelles se compensent » (Les monnaies alternatives, J. Blanc).

Si le WIR a fortement évolué et est devenu au cours du temps une banque coopérative, il reste l’exemple le plus probant de monnaie alternative inter-entreprise sur un territoire local puisque le WIR est même considéré comme la deuxième monnaie reconnue en Suisse.
Le système est utilisé en 2021 par un quart des entreprises suisses et la banque coopérative compte plus de 75000 PME clientes.
Il a même été démontré dans une étude (James Stodder) que la stabilité de l’économie suisse s’explique notamment par l’existence du WIR qui fonctionne spontanément à contretemps par rapport au franc suisse c’est-à-dire que son volume d’échange augmente lors de récessions dans le pays.

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Exemple du Sardex

Le Sardex est également un bon exemple de monnaie inter-entreprises qui a connu son émancipation suite à une période de crise. Il s’agit cette fois de la crise des subprimes. Le Sardex est né en 2009 en Sardaigne. Créé par cinq amis italiens dans le but de sortir l’économie sarde de la crise en privilégiant une économie de PME ancrées dans le territoire, c’est un système qui a connu une réussite exemplaire.
Afin de développer leur projet, les 5 italiens ont fait une levée de fond de 150 000 euros en 2011 et le Sardex se développe depuis à une vitesse fulgurante. Rien qu’en 2016, on compte 70 millions d’euros de transaction en Sardex pour 3500 entreprises membres. Il a permis de relocaliser une grande partie des échanges en Sardaigne et a connu un développement continu même en dehors des périodes de récession économique.

Pas seulement en période de crise ?

Même si les crises sont à l’origine du WIR, du Sardex et d’autres monnaies, les monnaies alternatives citoyennes ou interentreprises ont un intérêt quel que soit la santé du système économique. Elles forment une alternative qui permet de compenser le besoin en fonds de roulement et d’apporter de nouvelles ressources aux entreprises en créant de nouveaux échanges en sein d’un réseau actif.

La crise sanitaire du COVID-19 comme les crises économiques vécues renforce simplement les convictions et la détermination à agir en mettant en avant les besoins de changement. Chaque utilisation, de l’une ou l’autre monnaie (locale et complémentaire), doit participer au développement d’une économie locale, résiliente, respectueuse du vivant.

Le développement d’une monnaie locale interentreprises au sein de la MEL joue également un rôle dans l’attractivité du territoire, la relocalisation de l’activité et la préservation de l’environnement. Ces volets sont des sujets actuels, forts et toujours présents que ce soit en temps de crise ou de pérennité économique. Au niveau des acteurs du marché, les monnaies locales ont également un rôle fort notamment sur la trésorerie et la création de valeur.

Sources

  • Les monnaies alternatives, J. Blanc.
  • Créer des monnaies régionales pour traiter la crise globale, B. Lietaer.